Confidence d’une thanadoula

« Oui mais pour toi c’est facile, c’est ta formation et c’est ton travail »…
Cette phrase dite par ma maman alors qu’elle était en fin de vie a toujours eu un sens très spécial, plein de non-dits et sans le savoir, avec une certaine incompréhension.
Pour elle, parce que j’avais suivi une formation de doula et de thanadoula, je savais de toute évidence comment gérer des situations délicates, je savais annoncer avec tact et bienveillance, je savais ce qui arrivait ensuite, je savais poser les questions aux médecins et j’étais en mesure de retranscrire en explications compréhensibles, je savais gérer un deuil, des deuils, mon deuil si besoin, et donc, à ses yeux, tout était plus simple pour moi. 
Un jour en lui disant que nous avions tous des étapes à franchir autour du deuil, moi y compris, elle m’a dit que comme je connaissais déjà tout ça, ce serait plus facile à gérer pour moi, et pourtant…
On a beau côtoyer la mort plus ou moins souvent de par nos choix professionnels, et on a beau savoir qu’un deuil prend du temps et qu’il comporte plusieurs phases, on n’est pas épargné pour autant quand cela nous concerne personnellement, que l’on soit thanadoula, thanatopracteur, infirmier en soins palliatifs, ou autre.

Un deuil reste un deuil pour qui que ce soit.

Lorsque je suis touché par le deuil, même en tant que thanadoula, je suis concernée par les différentes phases du deuil : comme tout le monde, je passe par une phase de « déni« , de « colère« , pour ensuite basculer sur du « marchandage« , pour vivre une phase de « dépression« , et pour arriver au final à la phase de « l’acceptation« .
La « chance » que j’ai est de savoir que tout ça est normal, et que si je passe d’une émotion à une autre c’est également normal, que le temps est et sera toujours mon meilleur allié, que le processus prend le temps qu’il faut, et qu’il ne se visualise pas sur un calendrier. 

« Ce que nous avons jadis apprécié et profondément aimé, nous ne pouvons jamais le perdre, car tout ce que nous aimons profondément fait partie de nous »  Helen Keller


Que l’on soit jeune ou moins jeune, un homme ou une femme, thanadoula ou pas, nous sommes tous un jour ou l’autre amenés à vivre un deuil.

Ce deuil peut arriver suite à un décès attendu ou inattendu, mais également suite à un évènement qui  vient « chambouler notre plan de vie ».
Ainsi, il peut nous arriver de vivre tout type de deuils comme celui de la perte d’un proche, celui autour de la prise de conscience qu’on n’aura jamais la famille idéale dont on rêvait, celui des enfants en bonne santé qui sont finalement porteur d’une maladie grave, et bien d’autres deuils pas forcément en rapport avec une mort physique.
A chaque fois, et pour chaque type de deuil, les fameuses phases que sont le déni, la colère, le marchandage, la dépression et l’acceptation se présentent à nous, plus ou moins intensément.

Je vous partage un exemple très personnel.
Il y quelques mois je me suis retrouvée à devoir choisir entre rester au sein d’un groupe dans lequel je me trouvais pourtant très bien et d’accepter le changement des « règles », ou de respecter mes convictions et de partir.
Mon choix a été fait et pourtant, même si c’était mon propre choix, le déni s’est présenté à ma porte, m’obligeant à lire et à relire les messages pour savoir si je ne me trompais pas, si je n’avais pas interprété les nouvelles consignes… la colère et la tristesse ont affecté mon sommeil, mon corps a parlé par le biais de migraines très fortes (prise de tête peut-être), j’en suis devenue aphone pendant quelques jours avec beaucoup de mal à avaler ma salive (ou la nouvelle, je ne sais pas), puis, j’ai essayé de trouver de possibles solutions sans réaliser que j’étais en plein marchandage avec moi même. Pendant des mois, j’ai ressenti une très grande tristesse, un sentiment d’avoir vécu une injustice par le fait d’avoir perdu les liens humain qui me semblaient à un moment tellement précieux…
Le temps a passé, l’acceptation est arrivée peu à peu et j’ai réalisé que je n’aurais plus les mêmes liens qu’avant, et que l’histoire ne serait plus jamais la même, et aujourd’hui c’est ok.
Mon choix m’a fait perdre le lien qui s’était tissé me laissant seule une nouvelle fois, comme le jour où j’ai réalisé que je n’avais plus ni mon père ni ma mère.

« On ne guérit d’une souffrance qu’à condition de l’éprouver pleinement » Marcel Proust


S’il vous arrive de vivre un deuil, quel qu’il soit, gardez en tête qu’il est normal de traverser différentes émotions, et qu’elles nous touchent tous, grands, petits, hommes ou femmes, thanadoulas ou pas, sans distinction.

Au plaisir d’échanger avec vous, 

Armelle


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