Etre thanadoula en s’autorisant le bonheur

approche, blog

bonheur et fin de vieDepuis quelques jours sur mon compte instagram je mets en en avant une de mes photos avec une citation qui me parle, et la citation d’aujourd’hui est la suivante : 

« Il n’y a pas de honte à préférer le bonheur » Albert Camus


Cette citation me donne envie, pour une fois, de vous parler un peu de moi et de l’histoire que j’ai eu la « chance » de vivre ces dernières années.

Certains connaissent mon parcours, mais pas tous, alors aujourd’hui je vous partage un petit bout de moi.

Cela faisait presque 18 ans que je travaillais dans le tourisme à Saint Emilion, et un jour, alors que j’attendais mon directeur et des collègues pour commencer une nouvelle réunion, un des panneaux du « festival philosophia » posé contre un des murs m’est littéralement tombée sur la tête. J’avoue, je me balançais sur la chaise en attendant tout le monde, mais à aucun moment, moi qui ai fait des études d’anglais, je ne m’attendais à recevoir une citation de Shakespeare me tomber sur la tête. (les panneaux du festival philosophia sont très grands car mis en avant partout dans la ville dans le cadre du festival de philosophie, et ils illustrent la thématique de l’année avec des dessins et des citations. Une fois le festival terminé, des structures ayant participé d’une façon ou d’une autre reçoivent un ou plusieurs panneaux en signe de remerciement).

Voici ce que disait cette citation : 

“Tout esclave a en ses mains le pouvoir de briser ses chaînes” de William Shakespeare


Deux jours après ma rencontre avec Shakespeare commençait un échange avec mes supérieurs et un début de négociation concernant une rupture conventionnelle.

Une fois le départ validé, presque par magie (une fenêtre s’est littéralement ouverte sur mon ordinateur sans explication et sans raison) j’ai accepté les signes qui se présentaient à moi et, sans savoir pourquoi exactement, je me suis inscrite à une formation pour devenir Doula. Cette formation aura finalement été très importante pour moi car elle m’aura apporté 1001 informations précieuses autour de la naissance, des droits, des postures, de l’écoute, et du pouvoir de chacun à trouver ses propres solutions (je le fait en version très courte).

Toujours en me laissant guider par les signes de la vie, à la fin de mon année de formation je me suis inscrite à une nouvelle formation ouverte aux doulas souhaitant accompagner la fin de vie pour ainsi devenir une Thanadoula, ou de doulas de fin de vie.

Le rapport entre le métier de doula et celui de thanadoula (j’ai déjà fait un post à ce sujet que je vous invite à lire) ? Pour moi, même si c’est l’opposé au niveau « timing » car l’un concerne la naissance alors que l’autre touche la mort, les deux métiers sont très proches car autant pour l’un que pour l’autre on accompagne des personnes dans des étapes qui peuvent être mouvementées car inconnues, on est à leur côtés en leur permettant d’avancer et de cheminer peu à peu, en s’autorisant des choses, en osant demander ou en se permettant également d’en refuser d’autres.

J’ai donc suivi cette nouvelle formation pour devenir thanadoula pour ensuite apprendre, moins d’un an plus tard, que mon papa faisait une récidive très rare d’un cancer qu’il avait eu des années auparavant, et pour découvrir presque au même moment que ma maman avait un nouveau cancer (qui n’avait aucun lien avec le premier qu’elle avait eu près de 10 ans auparavant).

Vous allez vous demander où est le rapport avec la citation du bonheur d’Albert Camus, et votre interrogation est légitime, mais pour moi, le cheminement qui commençait à ce moment-là prenait tout son sens.

Pendant des mois, et jusqu’à leur tout dernier souffle, j’ai accompagné mon papa et ma maman. Depuis l’annonce de la maladie jusqu’à la toute dernière visite du médecin venant officialiser leurs décès, j’ai suivi leur quotidien, jour après jour, avec une disponibilité totale, par choix, jamais par obligation.

Au fil du temps, alors que la santé de mes deux parents se dégradait peu à peu, dans mon entourage on se questionnait quant à ma décision de les prendre totalement en charge.

Au fil du temps on me disait que, comme j’étais très impliquée, ça allait être très dur pour moi une fois qu’ils ne seraient plus là, que j’aurais du mal à me relever… Certains m’ont également mis en garde concernant mon corps et son épuisement, on m’a dit que je pourrais perdre mes cheveux suite au choc émotionnel, on m’a invité à faire attention à mes émotions non extériorisées, on avait peur pour moi.

Et pourtant, chaque moment passé avec mes parents aura été comme une petite goutte qui vient remplir un vase d’Amour jusqu’à le remplir à ras bord. Chaque expérience, chaque moment plus ou moins dur, je le conçois, m’aura permis d’accepter et de me préparer à leur départ définitif pourtant très proche.

Bien entendu j’ai été triste, bien entendu j’ai pleuré, et comme tout le monde d’ailleurs, mais le retour à mon quotidien a été serein et paisible, sans remords, sans regrets. Je me suis autorisé le bonheur, même si parfois j’ai eu des doutes.

Des doutes de mon bonheur ? non, mais des doutes concernant mes capacités oui, je le reconnais car, à force d’entendre que « même si j’avais l’impression que ça allait, à un moment ou à un autre ma tristesse allait me rattraper »… oui, j’ai fini par avoir des doutes.

J’ai donc pris rendez-vous avec une psychologue pour comprendre. Je voulais qu’on me dise si j’étais normale de ne pas être effondrée, de continuer à vivre sereinement, d’accepter la mort de mes parents après avoir été à leur côté pendant 6 mois pour l’un et pendant 1 an et demi pour l’autre.

Je la remercie pour notre échange car son sourire a été la validation de mes émotions, de mon histoire et car elle m’a confirmée que oui, j’étais normale et que j’avais le droit de m’autoriser ce bonheur (je vous le fait en mode rapide, encore une fois).

Donc oui, tout ça pour vous dire qu’il y a autant de deuils que d’histoires et autant d’histoires que de morts. Chacun chemine à son rythme et alors que certains s’autorisent le bonheur, d’autres n’osent pas.

S’autoriser à vivre pleinement ses émotions permet de s’autoriser à avancer peu à peu dans son deuil et dans sa vie, à son rythme car chacun est unique.

Au plaisir d’échanger avec vous.

Armelle 

Votre commentaire

Entrez vos coordonnées ci-dessous ou cliquez sur une icône pour vous connecter:

Logo WordPress.com

Vous commentez à l’aide de votre compte WordPress.com. Déconnexion /  Changer )

Photo Facebook

Vous commentez à l’aide de votre compte Facebook. Déconnexion /  Changer )

Connexion à %s

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.